Valeria ZOTTI, Monica TURCI (éds.), Strategie per la traduzione del lessico artistico. Da Giorgio Vasari a un corpus plurilingue dei beni culturali, Firenze University Press, 2023.
Dans leur introduction sur la traduction de la langue spécialisée des biens culturels (La traduzione del linguaggio specialistico dei beni culturali : dalle pratiche passate alle metodologie attuali, pp. 7-18) Valeria ZOTTI et Monica TURCI présentent un autre achèvement du projet LBC – Lessico multilingue dei Beni Culturali, né en 2013 à l’initiative de l’Université de Florence et dont l’objectif final consiste en la rédaction de dictionnaires spécialisés monolingues et bilingues du lexique artistique. Le présent ouvrage souhaite apporter une contribution considérable à la réflexion traductologique sur le patrimoine artistique et culturel, du point de vue humanistique et technique.
La première partie (« Le Traduzioni di Vasari alle origini di un lessico artistico europeo ») se compose de trois études qui approfondissent quelques aspects lexicaux et syntaxiques concernant la langue spécialisée de l’art, à partir des traductions de Le vite de Vasari – considéré comme le premier exemple de littérature artistique moderne – en allemand (Sabrina Ballestracci, Da un segno a tanti segni. L’emergere della polisemia del termine disegno nelle traduzioni tedesche delle Vitedi Vasari, pp. 21-38), en russe (Giovanna Siedina, Gabriele Papini, Le traduzioni russe della Vita di Cimabue di Giorgio Vasari: strategie traduttive a confronto, pp. 39-64) et en anglais (Antonella Luporini, Metaphors of art in the English translations of Giorgio Vasari’s Le vite : a software-assisted enquiry, pp. 65-92). Ces contributions développent un volet du projet LBC qui se propose la création de corpus parallèles contenant des traductions de textes de référence pour l’étude de l’histoire de l’art européenne, publiés entre le XVIII et le XX siècle.
La deuxième partie (« Pratica e didattica delle traduzioni del lessico artistico ») se penche sur certains aspects pratiques et didactiques de la traduction dans le domaine du lexique artistique et montre l’importance d’un recours raisonné aux corpus et aux ressources lexicographiques et terminologiques pour la pratique de la traduction et l’apprentissage linguistique. Cette section regroupe des contributions sur trois différents genres, à savoir le récit de voyage, le dictionnaire spécialisé et le glossaire terminologique, soit trois degrés de spécialisation du lexique artistique. Le premier article s’intéresse à la description du lexique artistique italien en russe dans un récit de voyage écrit par l’écrivain, critique et historien de l’art russe Pavel Muratov (Monica Perotto, Valentina Rossi, Natalia Zhukova, L’immagine di Firenze e Bologna in Obrazy Italii di Pavel Muratov : riflessioni sulla traduzione del lessico artistico, pp. 95-114). Elena CARPI (Jose Ramon Melida, traduttore del Lexique des termes d’artdi Jules Adeline, pp. 115-131) étudie la traduction et adaptation pour le public espagnol du Lexique de Jules Adeline, publiée sous le titre de Vocabulario de términos de Arte et considérée comme l’ouvrage lexicographique d’histoire de l’art le plus important du XIX siècle. Carpi s’intéresse, d’une part, au paratexte lexicographique (notamment aux images qui accompagnent les définitions à des fins de vulgarisation) et aux changements survenus dans l’ouvrage espagnol par rapport au Lexique français (augmentation de la nomenclature, ajout de notes explicatives et d’informations encyclopédiques, reformulation de certaines définitions, adaptations phonétiques, etc.) et, de l’autre part, à la créativité terminologique de Melida, qui a su remplir les vides lexicaux de l’époque en forgeant bon nombre de néologismes ayant survécu dans l’espagnol artistique d’aujourd’hui. Pour sa part, Christina Dechamps (Glossaire terminologique collaboratif et Data-Driven Learning dans le cadre de la traduction du lexique artistique, pp. 133-145) présente la réalisation d’un glossaire terminologique collaboratif bilingue français-portugais, issu d’une expérimentation conduite avec des étudiants de l’Université NOVA de Lisbonne et centrée sur le rôle des corpus dans l’enseignement et dans la solution de problèmes de traduction liés, par exemple, à la variation (para)synonymique et à l’équivalence en terminologie. Dechamps montre que la consultation systématique de corpus comparables, dont ceux qui ont été produits dans le cadre du projet LBC, ainsi que la création de nouveaux petits corpus par les étudiants impliqués dans l’expérimentation contribuent à améliorer l’apprentissage – à la fois au niveau de l’encodage et du décodage – et la professionalisation des futurs traducteurs spécialisés, notamment dans les domaines de l’architecture et de l’histoire de l’art.
La troisième partie (« Corpora di traduzione per la valorizzazione del patrimonio locale ») prône la constitution de corpus spécialisés pour la traduction et la mise en valeur du patrimoine artistique local, notamment dans le cadre du sous-projet LBC Émilie-Romagne. En particulier, cette section contient des études sur des petits corpus parallèles ou alignés bilingues crées ad hoc et analysés dans le cadre théorique et méthodologique des Corpus-Based Translation Studies. Les deux premiers articles de la section examinent les défis traductifs posés par la langue spécialisée employée dans le site Tour-ER, lequel promeut un itinéraire à la découverte du patrimoine de la famille d’Este. Si l’article de Ana Pano Alaman (Traducir al espanol el lexico de los castillos y fortalezas de Emilia-Romaña, pp. 149-168) s’occupe de la traduction en espagnol de la terminologie de l’architecture concernant châteaux et forteresses du Moyen-Âge et de la Renaissance, Gaia Aragrande et Monica TURCI (Translating Heritage Tourism in Italy. Churches and Palaces of the Ducato Estense, pp. 169-195) s’intéressent, quant à elles, à la traduction vers l’anglais de la terminologie spécialisée et d’éléments culturo-spécifiques relevés dans des textes autour des églises et des palais du Duché d’Este. Pour finir, l’article de Valeria Zotti (Traduire en français le lexique du patrimoine artistique de la ville de Bologne : le sous-corpus comparable BER du projet LBC, pp. 197-229) se concentre en particulier sur deux projets de recherche (Unicittà et UniVOCIttà) dérivés du projet LBC et centrés sur la mise en valeur et la traduction du patrimoine artistique de l’Alma Mater Studiorum et de la ville de Bologne, avec la création du sous-corpus BER. Ce dernier, comparé au corpus LBC français sur la ville de Florence, permet non seulement de relever des différences terminologiques significatives et d’étudier la synonymie diastratique et diatopique qui en résulte, mais aussi de proposer de nouvelles stratégies pour la traduction des collocations spécialisées et des termes artistiques faisant référence à des réalités culturo-spécifiques.
[Chiara PREITE]